Souvenirs du Major Davel

Le Château de Morges et ses musées possède dans son parcours permanent et ses fonds un certain nombre d'objets en lien avec le major Davel, dont on a célébré en 2023 le 300e anniversaire de l’exécution. En effet, dans les années 1970, la volonté de créer un "espace Davel" a encouragé l'achat ou le prêt de diverses œuvres, armes et médailles permettant d'illustrer la vie du major.

N’hésitez pas à contacter notre équipe de médiation pour une visite guidée axée sur le major Davel au sein du parcours permanent du Château de Morges et ses musées.
Gratuit pour les écoles publiques.

Plus d'informations: mediation.chateau-morges@vd.ch

Épée de justice avec fourreau, acier, cuir, bois, galuchat (peau de raie), Pays de Vaud/Berne, vers 1650-1700. Prêt du Musée cantonal d’archéologie et d’histoire, Lausanne, exposée au Château de Morges.

Ce glaive est l’une des deux "épées de justice" utilisées par l’exécuteur des hautes œuvres (bourreau) pour le compte de Leurs Excellences de Berne (LL.EE.) entre la fin du 17e et le début du 18e siècle (?). Sa lame est à bout "carré" et le manche est suffisamment long pour pouvoir être manié à deux mains.
Cette épée, prêtée au Château de Morges dans les années 1970 par le Musée cantonal d’archéologie et d’histoire de Lausanne, aurait servi à l’exécution par décollation du major Abraham Davel. L’inscription sur la lame mentionne au recto: "O Ihr Menschen Kinder ach Ihr fruhe Sünder… und fallet Gott zu füss sönst Ihr mit diesen Schwert dahin gerichtet werdet" / (Ô vous, enfants des hommes, pécheurs impénitents… humiliez-vous devant Dieu., sinon vous serez punis par cette épée). Au verso, il est gravé: "Dieses Schwert ist gewetzet und ich dazu gesetzet, von Gott und Obrigkeit zu straffen böse leüt" / (Cette épée est aiguisée et destinée par Dieu et le Souverain, à punir les méchantes gens).
Inv. CMM 1005000.

Médaille frappée par décision du Conseil de Berne le 28 avril 1723, récompensant les membres du Conseil de Lausanne de leur fidélité envers leur souverain dans l’affaire Davel, argent, Pays de Vaud/Berne, 1723. Collection du Château de Morges.

J. Hug (graveur)

Après l’arrestation d’Abraham Davel, Leurs Excellences de Berne avertie de la "conspiration" fomentée par le major constatent très vite la fidélité du Pays de Vaud à leur égard. Suite à l’affaire Davel, les Bernois émettent d’ailleurs une médaille récompensant les autorités lausannoises pour l’arrestation et la condamnation du major. La figure féminine qui y est gravée représente Lausanne, couronnée d’un rameau au pied du chêne Bernois, symbole de stabilité.
Inv. CMM 1005003. 

Discours prononcé avant l’exécution du Major Davel en présence du peuple assemblé pour son exécution à Vidy, le 24 avril 1723. Par le Ministre de Saussure, Lausanne: Imprimerie Corbaz et Robellaz, 1846. Collection du Château de Morges et ses musées.

[Louis-César de Saussure]

À quelques minutes de l’exécution du major Davel, le pasteur Louis-César de Saussure qui a accompagné le condamné jusqu’au gibet de Vidy, profère un discours ambivalent entre "condamnation de l’acte et apologie de l’homme" selon l’historienne Corinne Chuard. LL. EE. donnent l’ordre d’envoyer une copie de ce discours à Berne. Les auteurs de la réimpression de 1846 affirment que ce qui pouvait porter préjudice aux Bernois avait été retranché par le pasteur de Saussure. Plus de cent ans après la mort du major, cette réédition du discours atteste du mouvement d’héroïsation de Davel: quelques années plus tôt Juste Olivier consacre le personnage dans son ouvrage Canton de Vaud (1837) puis dans Le Major Davel (1842). La figure du héros et martyr de la liberté que représente celui-ci sert aussi les valeurs des vainqueurs radicaux de la Révolution vaudoise de 1845.
Inv. CMM 1004578.

Arrestation du Major Davel, huile sur toile, 1847-1850, Lausanne. Prêt du Musée cantonal des Beaux-Arts, Lausanne, exposé au Château de Morges.

François-Joseph Bonnet (1811-1894)

Le 1er avril 1723, Davel est arrêté sur ordre des autorités lausannoises. Au centre de cette œuvre, le major, entouré de plusieurs soldats et de deux conseillers de la ville, semble remettre son épée à son "ami" et compagnon d’armes Jean-Daniel de Crousaz (1682-1740), peut-être l’un des deux personnages derrière lui.
Contrairement à l’œuvre de Gleyre, premier artiste à représenter Davel moustachu, celui de Bonnet est imberbe, ce qui correspond à l’usage en cours au 18e siècle. Pour l’historien Nicolas Baptiste, cela suggère que l’œuvre de Bonnet est antérieure à celle de Gleyre. Selon l’historienne de l’art Constance Rabagnac Kinsky, cette œuvre peut être datée entre 1847 et 1850, soit après le séjour de son auteur François Bonnet à Rome, où ce dernier apprend à représenter la lumière tombante et chaude.
À noter que cette représentation ne reflète pas complètement la réalité historique. Davel a passé la nuit du 31 mars à la rue de Bourg dans la maison de Jean-Daniel de Crousaz. C’est là qu’il est appréhendé au petit matin et non sur la place de la Palud, comme l’illustre ce tableau. Les soldats de Davel, qu’on y aperçoit également, se tenaient en réalité sur l’esplanade de la cathédrale. Cette œuvre s’insère dans le contexte de l’avènement de l’État fédéral en 1848 et la production artistique de cette époque atteste d’une volonté de représenter des sujets historiques pour encourager le sentiment patriotique et l’identité nationale.
Inv. CMM 1005002.

Médaille commémorative frappée pour les 160 ans de l’exécution du Major Davel, bronze, 1883. Collection du Château de Morges et ses musées.

G. Bovy Guggisberg

Cette médaille porte l’inscription "Citoyen vaudois / Patriote et Martyr / Exécuté le 24 avril 1723".
Inv. CMM n° 1005004.

Buste du Major Davel, plâtre, vers 1898 ? Collection du Château de Morges et ses musées

Maurice Reymond de Broutelles (1862-1936)

Signé M. Reymond-de B., ce buste en plâtre est soit une copie, soit un modèle préliminaire de la statue en bronze du major Davel, érigée devant le Château Saint-Maire à Lausanne en 1898. Ayant pris la mesure de l’impact populaire des milliers de lithographies réalisées d’après l’œuvre de Charles Gleyre (1850), le sculpteur Maurice Reymond de Broutelle n’a pas osé se distancier du modèle inspiré de l’historien Juste Olivier, ami de Gleyre, pour façonner son Davel. Ce dernier est toutefois vêtu de sa tenue de major.
Inv. CMM 1005001.

Médaille commémorative du bicentenaire de l’exécution de Davel, laiton, réalisée par l’entreprise Huguenin Inc., Le Locle, 1923. Collection du Château de Morges et ses musées

Milo Martin Sc.

Alors que le centenaire de la mort du major n’avait pas donné lieu à des célébrations – les autorités vaudoises persistant à ménager le gouvernement bernois – le bicentenaire de 1923 s’illustre par de nombreuses et importantes manifestations dans le canton de Vaud. Pièces de théâtre et cérémonies commémoratives consacrent la figure désormais héroïsée et devenue culte du Vaudois. Cette médaille commémorative est gravée au revers: "Je prie Dieu que ma mort vous soit utile et salutaire/Le major Davel Vidy 24 avril 1723/Au souvenir du 2me centenaire de sa mort 1923".
Inv. CMM 1005023.

Statuette du major Davel, en terre cuite, peinte et émaillée, vers 1950, Suisse. Prêt des Archives fédérales suisses, Berne

Cette statuette du major Davel aurait été offerte au général Guisan dans les années 1950.
Inv. CMM 1005996.

Plusieurs cahiers contenant des notes ainsi que des dessins préparatoires représentant la vie du major Davel, encre de Chine aquarellée ou crayon, vers 1960, Vaud/Suisse. Collection du Château de Morges et ses musées

Henry Meylan (1895-1980)

Le Château de Morges possède la plus grande collection d’aquarelles et de dessins du peintre vaudois Henry Meylan. Celle-ci comporte un certain nombre de représentations de la vie du major Davel. Ces dernières devaient illustrer un ouvrage historique qui n’a jamais paru.
Inv. CMM 1008265-98.

Davel en capitaine-lieutenant au service de Hollande, dessin aquarellé, 1976. Collection du Château de Morges et ses musées

Pierre Favre (1911-1997)

En 1976, le Château de Morges commande trois œuvres à l’artiste Pierre Favre afin d’illustrer le propos d’un nouvel espace dédié au major Davel. Ces dessins aquarellés documentent trois périodes de la vie de celui-ci. Ce premier dessin illustre la carrière de Davel au service de Hollande. En 1692, Abraham Davel s’engage pour le souverain des Provinces-Unies puis roi d’Angleterre Guillaume III d’Orange, lequel envoie des renforts au Piémont au Duc de Savoie dans un contexte général de guerre entre la France et une coalition formée par l’Espagne, l’Angleterre et la Savoie. Probablement en raison de son expérience de notaire, le Vaudois sert d’abord en tant que secrétaire d’une compagnie sous le commandement du brigadier Jean Henri d’Oberkan, puis quelques mois plus tard, à la mort de ce dernier, comme enseigne au Piémont. En 1694, Davel est aide-major sous le commandement du lieutenant-colonel Jean de Sacconay (1646-1729), en 1697 il est nommé capitaine-lieutenant de la compagnie de Saussure puis de la compagnie colonelle. En 1706, Abraham Davel doit s’acquitter d’une amende pour avoir enrôlé illégalement des recrues quelques années plus tôt à Büren, en contradiction avec les ordonnances de LL. EE. En raison de sa qualité de sujet, il paie un prix plus élevé qu’un citoyen bernois. Cet incident péjorera ses possibilités d’avancement militaire et contribuera probablement à développer chez Davel un certain ressentiment à l’égard de Berne.
Inv. CMM 1005791.

Davel représenté en capitaine du régiment royal suédois de Sparre au service de France, dessin aquarellé, 1976. Collection du Château de Morges et ses musées

Pierre Favre (1911-1997)

Ayant été devancé par un officier bernois pour l’obtention d’une compagnie, Davel quitte le service de Hollande en 1708 et rejoint le service de France avec le grade de capitaine réformé dans le régiment de Sparre, constitué de Suédois et d’Allemands. Sa carrière militaire au service étranger qui s’achève en 1711 et qui aura duré près de 20 ans, "a pu forger sa conception de l’autorité" selon l’historien Gilbert Coutaz. Davel aurait souffert ainsi d’un manque d’égard concernant ses possibilités d’avancement.
Inv. CMM 1005790.

Davel dévoile son plan au petit Conseil de Lausanne, le 31 mars 1723, dessin aquarellé, 1976. Collection du Château de Morges et ses musées

Pierre Favre (1911-1997)

Le 31 mars 1723, Davel réunit 600 hommes à Cully et marche sur Lausanne, alors que les baillis sont appelés à Berne pour l’attribution annuelle des charges et emplois gouvernementaux. Davel se rend seul à l’Hôtel de Ville, après avoir laissé sa troupe à la cathédrale. Devant le Conseil des XXIV de Lausanne réunit en urgence, il présente son projet d’émancipation du Pays de Vaud avant de lire son Manifeste destiné aux Bernois.
Inv. CMM 1005022.

Bibliographie des notices

Chuard, Corinne

"Un major contre leurs Excellences"

Passé simple, no 17 septembre 2022, p. 3-8.

Chuard, Corinne

Davel, héros vaudois

Gollion: Infolio éditions, 2022.

Coutaz, Gilbert

Le major Davel, naissance du premier patriote vaudois

Yverdon-les-Bains: Château & Attinger, 2022.

Baptiste, Nicolas P.

"Davel ne devrait pas porter de moustache"

Passé simple, no 17 septembre 2022, p. 22-24.

Lovis, Béatrice, Poisson, Guillaume

"Entre histoire et mémoire, dans les pas du major"

Passé simple, no 17 septembre 2022, p. 16-18.

Rabagnac Kinsky, Constance

François Bonnet (1811-1894). La production d’un artiste français expatrié en Suisse

Mémoire de Master en études muséales, Université de Neuchâtel, 2019.

Société Vaudoise d’archéologie (dir.)

Le major Davel, 1670-1723. Etude historique écrite à l’occasion du deuxième centenaire de la mort de Davel

Lausanne: Librairie F. Rouge & Cie [et autres], 1923.